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Fiche article

9782916724560
Serov et moi en Grèce
Une œuvre de Bakst/ Medvedkova
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Cet article a été constaté en stock le 13 mars 2023.
Ouvrage broché portant le numéro ISBN 9782916724560, vendu 22 € et classé au rayon « Littérature », publié le 22 décembre 2014 par les éditions TriArtis et d'un poids de 300 grammes.
Mais qui était donc Léon Bakst et que faisait-il en Grèce en 1907 ? Et pourquoi, un an avant sa mort, en 1923, à Paris, publia-t-il en russe un livre intitulé Serov et moi en Grèce ? Et qui était Serov ? L'ouvrage que le lecteur tient entre ses mains est la première traduction en langue française d'un morceau exquis de la prose russe symboliste. Non seulement ce texte est un petit chef-d'oeuvre en soi, mais il permet de jeter un regard nouveau sur l'un des principaux créateurs des Ballets Russes. Du tableau Terreur antique aux décors et costumes de l'Après-midi d'un faune, mêlant au souvenir de la Grèce antique un orientalisme sensuel et coloré, Bakst inspire tout un courant dans l'art et la mode du début du XXe siècle. L'auteur de cette traduction et de l'essai introductif tente de retrouver les sources et de saisir l'originalité de l'hellénisme de Bakst. Prix 2013 de la traduction du Salon du livre et de la revue d'art - Festival de l'histoire de l'art à Fontainebleau.

Extrait tiré de l'ouvrage :

« Je tourne le dos à l’hôtel et en reste baba : un précipice gigantesque, sans fond dans la nuit, tout près de mes pieds… quelque part, tout en bas dans la vallée, sous les éclairs aveuglants bleu-mauve, reposent les temples blancs de marbre - maisonnettes de conte tombées en poussière entre les mains monstrueuses des Cyclopes… Est-ce par colère qu’ils les jetèrent des montagnes verticales et lugubres qui entourent, de leur chœur malveillant, le hardi sanctuaire blanc ?
En fendant impérieusement les ténèbres, les volées d’aigles géants planent, inquiets, en traçant des courbes impétueuses dans toutes les directions ; dans l’air épais, étouffant, plein de phosphore et d’électricité, on entend de trop près, juste sous nos pieds, le bruissement affreux de leurs ailes robustes…
Je m’éloigne involontairement du précipice… L’ombre de Ganymède glisse craintivement dans ma pensée… Le fracas assourdissant et le scintillement sont si forts, qu’il semble que l’éclair nous transperce tout entier - nous tenons à peine debout. Instinctivement nous nous tournons du côté de la trattoria et son air simple d’opéra atténue l’acuité de nos sentiments…

Serov affirme qu’il a faim ; je sens une sorte de reconnaissance pour ce revirement vers le banal besoin quotidien ; dans la salle qui comporte une table proprement dressée, parmi les bouteilles noires, mon œil ascétique remarque avec satisfaction des œufs durs posés sur un monticule de sel gris, plusieurs fromages frais et une assiette d’amandes et de raisins secs.
Quel plaisir de dîner sous le bas plafond blanc, de s’essuyer avec des serviettes propres brodées aux tons vifs, de siroter, avec du vin âpre, une somnolente conversation culinaire à propos des repas montagnards, du fromage de chèvre, bien meilleur que le fromage hollandais que l’on servait avec du pumpernickel1 sec chez Leiner à Pétersbourg2. Ô, ce restaurant de Leiner !
Sentimental, je me répands au sujet de la vieille et respectable madame Leiner, grosse veuve violette d’apoplexie, au sujet de ses dîners classiques pour un rouble d’argent - restaurant dans lequel nous étions d’honorables habitués de longue date.
– Certes, honorables ! Tu te souviens quand elle nous a offert à chacun un authentique petit verre d’argent en signe de notre fidélité décennale ? Tu te souviens ? Tu te souviens quelle bière munichoise étonnante on y servait ? Noire, épaisse… et les Allemands de chez Leiner - quel drôle de peuple !
– Tu te souviens quand on a surpris aux toilettes deux Allemands fort âgés qui se vidaient douloureusement :
– « Kannst-du noch3, Androuchcha ?
– Absoluuuuument ! »
Serov rit avec bonhomie, allume pensivement son cigare. De Delphes, de l’orage - on ne dit pas mot.

Mais avant de me coucher, tel le duc de la cavatine de Rigoletto, dans ma chambre minuscule et étouffante, j’ouvre largement la fenêtre qui, elle, n’est pas de théâtre.
L’orage grandit et se renforce. Par moment le vent romantique se calme et le silence lourd, précurseur d’un épique fracas assourdissant, devient insupportable, comme le spasme d’un enfant qui, juste après unechute, se tait pendant trois horribles secondes et tout à coup déchire l’air de son cri frénétique et, néanmoins, quelque peu apaisant.
De larges éclairs coupent sans cesse l’œil avec leur rasoir géant ; le précipice sans fond sous la fenêtre paraît alors encore plus velouté et sauvage.
Il y a un cauchemar atroce, véritable torture dans lequel tu n’arrêtes pas de tomber d’une hauteur effroyable dans une profondeur noire et inconnue, et ton corps est titillé jusqu’à la nausée par le sentiment de l’absence de sol sous tes pieds… Ce que je ressentais en me forçant à tenir bon contre l’orage devant la fenêtre ouverte était proche de ce cauchemar : ce chatouillement, le frère de la mort, s’approchait de moi…
Quel étrange, quel terrible décor !... Tout autour, sur les rochers, comme dans un colisée des Cyclopes, comme dans une volière magique faite pour des aigles géants, bâillent des trous profonds et noirs, des niches - sépultures abandonnées des pèlerins de l’Hellade et de l’Étrurie, des tombeaux des philosophes, des pontifes ayant vécu, étudié, professé près du sanctuaire glorieux.
Depuis longtemps se putréfièrent les ossements des stoïciens et des sophistes, bâtisseurs de systèmes ingénieux, chercheurs du sens de l’existence… Mais toujours, comme il y a trois mille ans, au printemps, Zeus tonne au milieu de la volée d’aigles effrayés par les éclairs et, chaque printemps, dans les ténèbres de l’Hadès, Perséphone pétrifiée de douleur - torve, terrible, assise dans son profond fauteuil de basalte - attend chez elle avec méchanceté, de la terre interdite et florissante, les enfants du soleil crédules et fragiles : les hommes… »

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